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Art au goût de café

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Scarlett G. | Fou
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MessageSujet: Art au goût de café Art au goût de café Icon_minitimeVen 31 Oct - 6:29


« Savoir l’art de plaire ne vaut pas tant que savoir plaire sans art.  » ▬  J-L Guez de Balzac


Cette journée n’allait pas être comme tout le monde. Comme tous les simples humains qui l’entourent, Scarlett avait lui aussi besoin de ces moments de pause où l’on se sent pousser des ailes. Sauf qu’il avait la possibilité de décider quand il allait et quand il voulait la prendre. Aujourd’hui, ce ne sera qu’un café. En ville. Malgré son côté asocial, il devait lutter pour travailler. Se faire mouton pour écouter les autres parler de tout et de rien. Un loup au milieu de la bergerie. Mais aujourd’hui, c’était encore différent. Aujourd’hui, il allait au milieu de la foule simplement pour ne pas être chez lui. L’aveugle qui aime autant son cocon a parfois l’envie de sentir les odeurs de la ville, d’entendre les bruits de la vie humaine ou encore ressentir ce qui l’entoure et ce comprendre ce qu’il ne voit pas.
Pourtant si souvent stratège, l’homme aux cheveux colorés hère dans les rues de Paris. Il semble perdu. Pourtant il sait où il va. L’homme s’amuse à flâner, gardant pourtant son air si sérieux. On ne dirait pas mais il se ressource, il s’apaise, il apprécie. Et puis le journaliste finit par sentir l’arrêt. Ses pieds n’avancent plus. Ils ont choisi. Ce sera ce café aujourd’hui. Aujourd’hui, il boira là. Mais c’était également un moyen de signer l’arrêt du silence et le début du « brouhaha » qu’il déteste tant.

Vous, vous n’auriez fait que boire un verre. Seulement voilà. Ce n’est pas vous. Vous ne tenez pas les reines. Ici, c’est un étrange aveugle qui décide. Et lui, il se permet. Personne ne lui autorise. Encore moins demandé. Il critique ce qu’il voit. Une œuvre. Un tableau. Une peinture accrochée au mur du café. Oh bien sûr, l’homme aux cheveux roses n’avait pas cette intention dès le départ. Ses pas rapides, décidés en direction du café n’était que pour aller s’y ressourcer. Et pourtant. Tout avait basculé à cause d’une remarque idiote. Le client ne faisait que laisser son regard vide vagabonder sur ce qui l’entoure sans pour autant y prêter attention. Le serveur voulait se faire agréable. Il pense que Scarlett aime le tableau. Il pense que le regard insistant se perd dans l’immensité du paysage dessiné sur cette toile rectangulaire. Mais il n’y a rien de poétique aujourd’hui. Rien de profond dans les pensées du journaliste. Oh non. Perdu dans ses pensées, il cherchait à détruire une nouvelle proie. Alors notre héros de roman a un rictus. Sourire narquois qui dessine l’interrogation sur le visage de l’employé. Mais ce n’est que le début. Il ne préparait pas ses défenses. Comment aurait-il put deviner ? Son envie de détendre le client aura eu raison de lui avec Scarlett. Le moindre échange est une aventure, un affront et une énigme en même temps. Car lorsque l’aveugle ouvre la bouche, ce ne sont que piques et fléchettes qui en sortent.
Etait-il beau ce tableau ? Assurément non. Pourtant voilà que ce serveur se pavanait comme un paon fier de ce qu’il avait cloué au dessus de la table où c’était assis Scarlett. Ce dernier ne supportait pas qu’on siffle les louanges d’une œuvre que l’on ne sait même pas traduire … ou bien lire pour les plus ignorants. Le journaliste n’est pas critique d’art. Pourtant, Monsieur se permet encore ce qu’il veut. Il n’aime pas ce tableau alors il ne faut pas essayer de le lui vendre. Un affront. Oh oui, notre jeune homme prenait le sourire du serveur comme un affront.

 
« Vous rigolez j’espère. »

dit-il sèchement sans même regarder l’employé aux cheveux bien coiffés.
Le pauvre destinataire ne savait que répondre. Il ne sait même pas quel est l’objet de cette remarque. C’est la première fois qu’on doit lui répondre avec agressivité pour une phrase aussi banale. Pourtant Scarlett est ainsi. A faire attention à chaque tirade, chaque mot prononcé par l’ensemble des acteurs du monde. Même les simples interrogations de courtoisies pouvaient rapidement tourner au cauchemar… Méfiance est l’accessoire de mode avec lesquels n’importe qui devrait s’équiper pour s’exprimer face au journaliste à scandales.

Devant l’absence de réponse, l’homme à la coupe au bol rose soupire discrètement avant d’ouvrir à nouveau la bouche et siffler :

 
« Ce tableau n’a rien de beau. »
Essayait-il de faire des rimes ? sans doute un moyen de tester celui qui faisait face à sa personne. Finalement, comme s’il se doutait qu’il n’aurait pas de réponses intéressantes ou intelligentes, il poursuit :

 
« Cette œuvre est d’une médiocrité affligeante. Est-ce votre nièce qui l’a faite ? La simple fierté de montrer un tableau comme celui-ci le rend tellement fade. »

Ca y est, l’inconnu avait enfin compris. On critiquait le tableau. On détrônait l’artiste. On se moquait de lui, en tant que simple homme courtois. Il devint rouge de colère et de honte. Comment ce client osait-il le prendre pour un idiot ?
Mais le jeune homme refusait de s’abaisser à hurler. Cela ne ferait que renforcer les aprioris de cet homme étrange sur lui. Il n’allait pas lui donner raison. Alors l’homme se calme et demande de quoi il s’agit. Le pourquoi du comment. L’explication d’un tel dégout. S’il y en a une… Il tourne sa tête vers l’homme. Sans le voir. Et pourtant. Il a l’impression de savoir comment il est. Il le voit à travers la sueur de sa chemise, le parfum presque effacé ou encore l’énervement qui émane de lui.

 
« Le tableau ose orner une femme de couleurs chatoyantes. Ce n’est que récompense pour des biens qu’elle n’a pas fait. Les couleurs du tableaux expriment la joie et le bonheur tout en exposant le dos nu de deux femmes. Avons-nous uniquement le désir et la femme comme bonheur ? L’homme est alors bien pauvre. Tout comme ceux qui arborent des sourires tout faits ou qui cherchent à engager la conversation avec une personne qui va juste rapporter des sous à leur patron pour qu’ils espèrent enfin une augmentation. Je me trompe ? »

C’était trop. Il n’en pouvait plus. Cet homme se moquait littéralement de tous ceux qui l’entourent. Il se dit que personne ne lui en voudrait d’effacer cet insecte de la surface de la terre. C’est donc furibond qu’il se jeta sur l’aveugle. C’était mal parti pour un café tranquille, n’est-ce pas ?
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Gabriel D. | Lumière
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MessageSujet: Re: Art au goût de café Art au goût de café Icon_minitimeMer 15 Juil - 7:20
« Quand on se retrouve empêtré malgré-soi dans un malheureux incident » 

Ou la rencontre avec un client difficile.


S'il avait pu, il serait resté dans son lit, enroulé dans sa couette, bien au chaud dans les bras de Morphée. Seulement, ses obligations en avaient décidé autrement. En petit étudiant qu'il était, il avait dû s'extirper de force de ses couvertures, trouver le courage de se préparer et manger avant de filer. Et ce, même s'il avait passé une bonne partie de la nuit éveillé pour poursuivre la peinture de sa toile. Le travail n'attendait pas, et l'argent lui était nécessaire, surtout pour des études aussi coûteuses que les siennes.

Et le voilà qui marchait dans les rues déjà animées de Paris, encore tout somnolent et fatigué. Frotter ses yeux n'y faisait rien, son pas était toujours aussi lourd et traînant, comme si le poids du sommeil s'accrochait toujours à ses épaules. Tiré vers le bas, il lui fallait pourtant gardé la tête haute. Ce fut toujours dans cet état semi-éveillé qu'il pénétra dans le joyeux café. Il n'était pas le premier à arriver, loin de là, mais pas non plus le dernier. Il était à l'heure, tout simplement.

Il devait être aux alentours de 10 heures lorsqu'il prit son service. Comme à son habitude, il salua ses collègues avant de s'élancer entre les tables, prenant les commandes et apportant les consommations. Il avait fait tout cela tellement de fois que les gestes, les paroles, les sourires... Tout devenait presque automatique. C'était là son quotidien. Et chaque jour de travail se ressemblait, avec son lot de clients tantôt agréables, tantôt grincheux. Que serait un café sans clients pour râler à tour de bras ?

S'il s'était aujourd'hui attendu à vivre une journée comme les autres, ce ne fut pourtant pas le cas. Un facteur imprévu avait fait son entrée. facteur qui lui restait inconnu pour le moment. Gabriel n'avait pas tout saisi, n'ayant pas assisté à toute la scène. Tout ce qu'il avait pu voir fut son jeune collègue, rouge de colère, se jeter à la gorge d'un client. La raison ? Il ne la connaissait pas mais il eut le réflexe de se précipiter à la table pour tempérer les choses. Et il ne fut pas le seul. Un autre collègue retenait le serveur furieux tandis que Gabriel, le plus calme, s'occupait de l'homme aux cheveux roses.

"Vous allez bien ?" demanda-t-il poliment, l'aidant à se relever et époussetant son habit.

Le serveur fautif fut tiré jusqu'à l'arrière de la boutique tandis que d'autres s'excusaient auprès des clients pour le grabuge. Bien vite, l'ambiance détendue du café revint tandis que notre étudiant s'affairait à remettre en ordre le coin de l'inconnu. Dans la cohue, un tableau s'était décroché. Ce fut tout naturellement que Gabriel le remit en place, non sans lui jeter un coup d'oeil. Deux femmes exposant leur dos nus, des couleurs chatoyantes... N'y prêtant ps plus d'attention, il se retourna vers le client et se courba.

"Nous sommes sincèrement navrés pour cet incident, c'est très fâcheux et fort inhabituel de la part de mon collègue... Il n'est pourtant pas du genre à s'énerver de la sorte. Permettez-moi de vous dédommager. Que puis-je vous offrir ?"

Il était tout à fait normal qu'un dédommagement soit proposé au client dans de telles circonstances. Et si Gabriel restait curieux sur la raison de ce raffut, il n'en laissa rien paraître. Cela aurait pu paraître fort impoli devant cet homme qui dégageait une aura toute particulière. Étrangement, Gabriel sentait que c'était le genre de personne à prendre avec des pincettes, mais il n'aurait su dire pourquoi. Peut-être, justement, à cause de cette aura ? Allez savoir...
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Scarlett G. | Fou
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MessageSujet: Re: Art au goût de café Art au goût de café Icon_minitimeMer 12 Aoû - 17:42

« Il ne faut pas oublier que le plus grand homme n'est jamais qu'un animal déguisé en Dieu. »  ▬ Vauvenargues


Ca va ? Vous allez bien ? Comment tu vas ? Cette question parfaitement inutile lorsque la personne vient de se faire jeter littéralement au sol par un homme en colère. Grâce à l'aide du nouvel acteur récemment entré sur la scène, le journaliste pu se relever et passer sa main sur ses vêtements comme pour retrouver un aspect propre même dans cette pièce récuré chaque matin. Un geste plus machinal que réellement calculé et pour un soucis de propreté. Il tâtonna un peu le sol pour chercher sa canne, faisant mine, comme à son habitude, d'avoir été blessé à la jambe. Une excuse pour, une nouvelle fois, laisser son handicap vivre dans le secret. Pas la peine que tous les clients du café apprenne que le prince de la rue chic était aveugle. Encore moins de savoir comment...

Que faire si l'autre nous en veut, nous ignore, nous fuit, nous blâme, nous ridiculise ou nous méprise? Que faire si l'autre est trop susceptible, comprend mal, boude, se plaint à d'autres? Parce que ce client, était loin d'être facile. Non, répondit-il froidement au jeune homme. On venait de le pousser. Lui, un pauvre aveugle. Mais cela avait été un jeu. Il imitait même le client en colère. Jusqu'au bout, il ira dans le mensonge aujourd'hui. Pauvre serveur qui avait souffert de son humeur maussade. Après tout, hier encore, il avait perdu celui qui maintenait sa vie. Alors il massacrait tout sur son passage. Avec classe et sans violence mais avec une méchanceté sans limite. Le journaliste n'aidait pas mais ne demandait pas d'aide non plus. On l'avait aidé ? Bien. On lui proposait autre chose comme tout bon professionnel ? Bien. Mais au font, il n'avait plus vraiment soif. Peut-il demander une collation sans réellement l'avoir mérité ? Non. Scarlett avait ses principes.

 
▬ Me servir à boire ? Il me faudrait déjà des gens avec de bons goûts pour me servir.
siffla le journaliste entre ses dents.

Est-ce que ce nouveau serveur était plus intelligent ? Est-ce que le nouveau serveur avait plus de goûts en matière d'art ? Bien, le jeu allait pouvoir continuer.

 
▬ Êtes-vous amateurs d'art, mon ami ?
posa t-il sur table avec un soupçon d'ironie.

Il allait falloir qu'il trouve la réponse. Il allait falloir qu'il se lance lui aussi dans la partie. Scarlett ne supporterait pas d'avoir un autre inculte dans cette même pièce, dans cette même journée. Bien sûr, plus naïf étaient les gens, plus facile il était de les berner. Mais pas aujourd'hui. Après le départ de son chauffeur, notre héros de roman avait besoin de discussions construites avec un autre bipède. Pourquoi ne pas parler d'art ? Même s'il était aveugle, l'homme aux cheveux roses avait des goûts de luxe et une capacité à observer les œuvres d'art qui lui avait permis de se souvenir de cette peinture. Décidément, ce café n'avait pas changé... Puis personne ne savait qu'il ne voyait pas, pouvait-il alors prétendre voir, même un instant ? Scarlett saurait arrêter le jeu, si cela devient trop dangereux... pour lui.

L'aveugle huma l'odeur du café qui emplissait la pièce puis reprit son mauvais tour :

 
▬ Je ne commanderai dans votre établissement que si vous me dites avec honnêteté ce que vous pensez de ce tableau, ainsi posé au mur.

L'aveugle senti l'autre serveur bousculer légèrement ses amis qui le maintenait pour éviter d'avoir à laver les taches de sang d'un riche parisien trop vilain pour être apprécié.

 
▬ Si vous vous inquiétez de la réaction de votre collègue ou celle de votre patron, face à un affront, ne le soyez plus. Je leur dirais.

Ce n'était pas par jugement de valeur, par envie de se mettre sur un piédestal pour pour prendre l'inconnu de haut, qu'il prévenait ainsi. Non. C'était uniquement pour avoir une réponse à la hauteur de ses attentes et naturelle. Le journaliste voulait que la réponse soit véridique spontanée. Bien sûr. Voilà tout.

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