Margaux a deux joues rebondies, deux grands yeux bruns et deux adorables fossettes au creux des joues ; non, Margaux ne mesure pas 1m75, et non Margaux n'est pas mannequin. Plantée devant le miroir de sa salle de bain (le miroir psyché que sa mère déteste), elle tourne sur elle-même et cherche souvent ses défauts. « Va falloir arrêter de manger, ma vieille », lui glisse son frère en tapotant ses fesses – qui, Margaux le nie, n'ont absolument pas besoin d'une liposucion (et puis si un jour ils ont un accident de voiture, ses  airbags postérieurs la sauveront, na). « Tu devrais peut-être faire du sport, ma chérie, c'est bon pour la santé », lui conseille son père quand elle se plaint de son ventre absolument pas plat. Margaux ronchonne, clame qu'elle n'aime pas le sport, que c'est trop fatigant, et qu'elle aime bien ses formes et que c'est mieux qu'être une brindille comme sa cousine Élodie. Margaux se plaint de beaucoup de choses, oh ça oui, mais au fond, elle s'aime comme elle est.
Du haut de son petit mètre 62, elle se situe pile dans la moyenne française (si, si, elle a vérifié) et si on lui demande son poids, elle confie habilement une fourchette allant de 50 à 70. Comme ça, ça donne à son interlocuteur de quoi méditer cinq bonnes secondes. Pas sportive pour un sou, comme vous l'aurez compris, elle peine à suivre la cadence quand ses amis se mettent à courir après le dernier bus ou le dernier métro. Vite essoufflée, vite fatiguée, elle n'en demeure pas moins amusante à regarder quand elle essaye de sauter par-dessus une barrière ou un mur (oui, bon, c'est mal de se moquer, mais Margaux rit plus qu'elle ne boude). Ronde mais pas complexée, elle aime les jeans, les t-shirt, les converses, mais aussi les robes à fleurs et les shorts aux motifs douteux – sa garde-robe est variée et elle ne rechigne jamais à mettre ce qu'on lui donne. Ses goûts sont vastes comme l'océan Pacifique et pas du tout cloisonnés. Évitez quand même de lui dire « tu t'habilles comme un sac », parce que ça ne fait jamais plaisir à entendre.
Avec ses cheveux bruns souvent attachés en queue de cheval et sa peau pâle qui bronze dès que l'été pointe le bout de son nez, Margaux n'a rien d'exceptionnelle et son visage n'est ni particulièrement marquant ni particulièrement beau. Si vous la croisez dans la rue, vous ne vous retournerez pas sur son passage et vous l'oublierez vite. Une fille comme les autres, en somme, qui ne s'en plaint qu'avec des posters de mannequins passés sous photoshop devant la figure.

Margaux n'a rien de torturée, rien de fascinant, pas le moindre problème sur son carnet de santé ; et si elle dit qu'elle est allergique aux carottes, c'est juste pour éviter d'avoir à en manger.
Dommage que Margaux soit une bien piètre menteuse.
La première chose dont on se rend compte en côtoyant la jeune fille, c'est qu'elle ne se prend pas vraiment la tête. On est en retard ? Bha, c'est pas si grave ! J'ai pas révisé ? Je me rattraperai au prochain contrôle ! Foncièrement positive et prompte à sauter sur place sans raison, il arrive cependant qu'un rien l'affole : ses amis se demandent toujours quels sont ses critères à ce niveau. Facilement impressionnable, il lui arrive de pousser cris de joie et d'horreur sans se soucier des décibels qu'elle escalade de sa voix aiguë. Le regard des autres ne gêne pas vraiment Margaux, elle y fait attention tous les premiers samedis du mois. Mieux vaut en rire qu'en pleurer pour être sa devise, et qu'elle fait de son mieux pour appliquer en toutes circonstances. Pas vaniteuse, pas  fière comme un paon, assez maladroite, elle finit toujours par rire de ses chutes ou de ses malheurs. Tous ses pleurs, ses cris et ses rires en reviennent au même point de départ : c'est pas grave, tu verras ! C'est pas grave.
Le tableau que l'on dresse de Margaux peut vite basculer dans le niais tant elle ne donne pas d'elle l'image d'une fille sérieuse et portée vers l'avenir. On peut la dire naïve, un peu cruche, stupide et incapable de se concentrer sur quoi que ce soit ; pourtant Margaux se méfie et ne fait pas confiance au premier venu. Tendre la main, ça oui, mais donner son bras tout entier, non merci. Ses parents lui ont bien appris à ne pas balancer sa confiance à tout va – curieusement, c'est un enseignement qui lui reste. Derrière son grand sourire se cache une certaine jugeote qu'on serait bien en tort de lui amputer sur la base de simples apparences.
« Enfin, t'es quand même gentille, quoi » lui dirait son frère d'un ton taquin. Margaux n'est ni très intelligente, ni très fine ni très maligne, elle a le droit au lot du commun des mortels et doit se débrouiller avec ce qu'elle a. L'avantage avec elle, c'est que la jalousie et la rancune ne durent jamais bien longtemps.

Margaux est une girouette de rires, avec les inconvénients et les avantages que le vent apporte avec lui.