L'air est libre dans cette nuit de juin. Il virevolte avec délice, évite les effluves chaudes qui remontent de la civilisation et hésite, glisse entre les immeubles parisiens. Une fenêtre ouverte, il s'engouffre dedans avec une curiosité typique de voyeur. L'appartement est plongé dans la pénombre, mais des veilleuses branchées sur des prises assurent un chatoiement rouge, jaune et vert, passant tour à tour. Les murs sont loin. Oui, tout va bien.

Non, bon dieu, tout ne va pas bien.

L'autre source de lumière, un écran de pc, éclaire le visage agacé d'Anicée. Ce soir, il aurait pu faire un raid, il aurait pu faire un dota, n'importe quoi, ses amis l'y invitait. Mais ce soir, il a du tout décliner pour faire ses comptes. C'est chiant d'être adulte. Surtout pour voir que ça va si mal, niveau budgétaire. L'année dernière, il y avait eut la brave augmentation annuelle de loyers et les charges qui avaient aussi prit des cours d'escalade. Lui, il s'était dit que ça allait passer. Qu'en faisant attention à ce qu'il consommait, à son maigre petit salaire de barman, à ses dépenses en générale, ouais, ça suffirait. Mais le présent et la réalité le rattrape : force est de constater que non, ça ne passe pas. Qu'il est en déficit et que ses réserves ont quasiment fondues. D'ici quelque mois, il ne pourrait plus payer le loyer.

Ah.

La clope au bec, il la grignote d'angoisse, réfléchit aux différentes opportunités qui se présentent à lui mais aucune n'est satisfaisante. Déménager ? Il sait qu'il n'arrivera jamais à trouver aussi grand pour un aussi bon prix. Partir de Paris ? Il a ses habitudes, ses potes, son job et ne saurait pas vraiment où aller. Aller chez les dits potes ? La plupart sont mariés ou en couple. Les ménages à trois, ça le ferait chier. Surtout pour être « le type avec le couple ». Il se passe une main dans les cheveux, cette histoire ne le laisse pas tranquille.

Il y a bien une solution.

Ça le fait un peu grimacer, il aimerait trouver autre chose, mais se dit que le temps presse. Il approche les mains du clavier et en un soupir agacé, commence à taper.



Le lendemain, quelques boulangeries et épiceries affichaient une annonce imprimée et découpée maladroitement. Quelque site d'annonces faisaient passer l’information et quelques journaux peu coûteux finissaient le relais.

Citation :

C'est la crise ! Paris est de plus en plus cher tandis que mon salaire reste désespérément le même. Alors, afin de ne pas me retrouver dans la rue, je cherche un colocataire.
J'habite un grand appartement dans le 5ème, 3 pièces, facilement aménageable pour vivre à plusieurs sans êtres les uns sur les autres, proche de tout commerces et des transports en commun.
Cuisine séparées, salle à vivre, salle d'eau et WC individuels sont aux rendez-vous -quel luxe !-

Je suis un homme de 36 ans, barman aux horaires irrégulières, qui vit principalement la nuit et est plutôt de nature tranquille.

Intéressé ? N'hésitez pas à me contacter aux 06 xx xx xx xx pour une première rencontre, voir si le feeling passe bien !

Tous les jours, la jeune femme faisait le "long" voyage entre son école de commerce et là où elle vivait avec sa famille depuis qu'ils étaient installés à Paris. Sauf qu'à 22 ans, il était peut-être temps pour la jeune femme de quitter le cocon familial et de se trouver son propre appart. Le problème était que même si elle se faisait pas mal d'argent grâce à ses petites ventes, elle n'aurait pas assez pour payer un loyer et elle ne voulait pas non plus trop s'éloigner de sa famille. La rousse avait donc presque abandonné cette idée quand elle vit, un jour en rentrant chez elle, une annonce dans une boulangerie. Quelqu'un cherchait un colocataire dans le cinquième. Il avait noté "un" mais peut-être que "une" ça irait aussi.

Elle sortit alors son portable et prit l'annonce en photo avant de reprendre sa route vers son domicile. En rentrant la première chose qu'elle fit se "jeter" sur sa sœur, dans un élan de joie qui lui était propre. Le soir au repas, la jeune femme annonça sa découverte de l'annonce et le fait qu'elle allait sûrement contacter l'homme qui l'avait passé. Ceci, tout en aillant son air totalement naïf sur le visage. Cela ne semblait pas vraiment rassurer ses parents, mais elle faisait comme si elle ne comprenait pas pourquoi, en réalité bien-sûr qu'elle savait qu'habiter avec un total inconnu pouvait être dangereux, mais elle voulait son indépendance et allait la prendre. Bon, elle ne le dirait pas comme ça, elle dirait à ses parents qu'elle voulait vivre comme une grande fille.

Une fois le repas terminé, elle aida à débarrasser et à mettre dans le lave-vaisselle, mais en prenant les couverts du bout des doigts, après tout ils étaient sales et c'était dégoutant pour une pauvre jeune fille comme elle. Elle alla ensuite dans sa chambre regarda la photo de l'annonce qu'elle avait prise, nota le numéro et appela ensuite. Les sonneries s'enchainèrent mais pas de réponse, elle préférait avoir la personne de vive voix plutôt que de laisser un message, elle raccrocha donc pendant que la petite voix faisait son spitch habituel et elle décida qu'elle rappellerait le lendemain. Sur l'annonce, il était noté qu'il était barman, donc peut-être qu'il travaillait. Elle se mit donc à travailler ses devoirs et ses cours en prévision d'éventuel devoir et de ses examens.

Le lendemain en milieu de matinée, elle se décida à rappeler le numéro présent sur l'annonce. Les sonneries s'enchainèrent de nouveau et elle crut qu'une fois encore elle n'allait pas réussit à le joindre, mais après quelque sonnerie une fois masculine se fit entendre à l'autre bout du téléphone. La rousse sourit alors rassurée et prit la parole.

« Bonjour, je m'appelle Juliette, j'appelle pour l'annonce de colocation »

Elle avait parlé de sa voix enjouée habituelle.

Un appel manqué avait marqué le téléphone quand il l'avait retrouvé après le boulot.
Pas de nouveau message finissait la note. Anicée eut une grimace et se posa des questions sur le bien-fondé de sa démarche. Des gens appeler pour faire des farces ? Noooon, ça n'arrivait jamais à Paris. Tandis qu'il effaçait la notification, il se fustigea de nom d'oiseau a avoir laisser sciemment, à la vue de tous, son numéro de téléphone, porte ouverte à tout type de spam et blague de mauvais goût.

Le lendemain, l'appel l'arracha trop tôt, à son goût, des bras de Morphée. Dans un premier élan, il se dit qu'il n'allait pas répondre. Dans un second, plutôt gueuler comme un putois sur la personne qui l’appelait si tôt. Puis il vu l'heure et rectifia : il gueulerait comme un putois à appeler si tard. Mais se ravisa. C'était lui le fautif à avoir des heures pas possibles et à tout de même trouver le moyen de veiller un peu plus tard en jouant, on regardant sur les sites les dernières nouveautés... Alors il décroche.
Sa voix est encore cotonneuse de sommeil, mais il répond et tente de se montrer le plus poli possible. Il espère juste que la personne à l'autre bout de l'appel ne détectera pas sa voix ensommeillée qui le qualifierait rapidement de « grosse feignasse ».

« Mouallô? » Pour le côté « je suis un homme qui vit sainement » c'était mal partit. La voix féminine continua quand même et en une phrase, assura l'homme que ce n'était pas une farce. Il en fut soulagé.

Minute.

Féminine ?

« Ah, heu, oh, bien ! »

C'est ce qu'on appelle « avoir l'herbe coupée sous les pieds » ou un truc du genre. En passant son annonce, jamais il n'aurait cru qu'une femme puisse y répondre. Pas par misogynie. Simplement parce que l'idée ne lui avait simplement pas du tout rendue visite, ni ne s'était annoncée. Il en resta une minute encore bête et se reprit.

« Ah, mais bien, oui ! Heu. Tu veux qu'on se rencontre ? » Là, après l'homme qui vit en Hermite, nous avons l'homme qui s'arrange des plans drague foireux. « Pour discuter de la location, rien de plus ! » L'homme qui s'enfonce en se justifiant maintenant. « Enfin, je veux dire, tu... VOUS faîtes quoi dans la vie ? Je veux dire. Vous avez des références ? Je fais pas pas payer le loyer parce que vous êtes une femme ! » L'homme goujat maintenant.

Il se claque le front de désespoir. Celle là, il se dit qu'il vient de la laisser filer, pour sûr. Le prochain, il se promet d'être silencieux comme une carpe.

« Pardon, je suis pas super réveillé. »
L'homme qui passe aux aveux, enfin.

Quand elle appela la personne qui avait posé l'annonce, le lendemain, elle attendit quelques sonneries avant qu'une voix à moitié endormît lui répondit en marmonnant un "allô". La jeune femme se présenta alors et lui précisa qu'elle l'appelait pour l'annonce qu'il avait passée. Elle avait parlé de sa voix innocente et un peu naïve, habituelle, mais à l'intérieur, elle se demandait sur quel genre de spécimen elle venait de tomber, surtout qu'il venait sûrement de se rendre compte que c'était sérieux car sa voix venait de changer. Peut-être qu'il ne s'attendait à ce qu'une femme réponde à l'annonce, en même temps, il n'était pas courant qu'une femme appel un homme pour vivre en colocation avec lui.

Elle resta silencieuse puisqu'il enchaîna rapidement en lui demanda si ils voulaient qu'ils se rencontrent. Elle se doutait que s'était pour parler de la collocation, mais il se sentit obligé de se justifier en lui expliquant. Elle allait répondre quand il lui posa enfin des questions qui étaient intéressante pour une probable collocation. Ce qu'elle faisait et si elle avait des références. Elle décida cette fois de répondre, mais il avoua enfin qu'il n'était pas réveillé.

« Je suis en école de commerce. Et je gagne de l'argent en travaillant un peu. J'aurais de quoi payer le loyer ne vous en faites pas »

Elle avait un grand sourire en parlant. Oui, elle aurait de quoi payer, elle trouvait toujours de quoi se faire de l'argent, il n'y avait pas de problème. Puis si jmais c'était serré un mois, elle monterait un peu plus le prix de ce qu'elle endait, rien de très grave.

« Ne vous en faites pas, ce n'est pas grave. Je veux bien que l'on rencontre. Quand voulez-vous qu'on se voie ? »

Elle avait attrapé un morceau de papier pour noter ce qu'il allait lui dire. Elle préférait qu'il choisisse, comme ça peut-être qu'il serait plus détendu et plus réveillé. Elle nota les informations sur le morceau de papier et elle sourit.

« Très bien, à tout à l'heure »

Elle sourit et lui dit comment il pourrait la reconnaître, lui disant qu'elle était rousse et qu'elle aurait une jupe noire. Elle raccrocha ensuite. Elle posa ensuite son portable à côté d'elle et alla se préparer. Elle retira son pyjama et enfila une jupe noire avec un haut blanc, une veste noire et une ceinture en décoration sur la taille. Une fois prête, elle alla travailler un petit peu ses cours. Quand il fut presque l'heure du rendez-vous, elle prit son sac à main et sortit de chez ses parents.

Elle se mit à marcher jusqu'à l'arrêt de bus. Elle le prit ensuite et arriva à peu près à l'heure au rendez-vous, en fait, elle avait quelques petites minutes de retard, mais rien de bien important. Elle chercha du regard la personne qu'elle devait retrouver ici.

Le dieu miséricordieux des mal-réveillés est avec toi, Anicée, car la jeune femme ne raccroche pas en se moquant ou te traitant de tout les noms. Ô, gloire, gloire à ce dieu bienveillant qui te regarde, frotte tes petits yeux pleins de sable du sommeil et se donne tant de mal pour décrasser ton cerveau !

Et il a du mal, le dieu. Anicée, il n'en croit que difficilement ses oreilles quand elle répond sérieusement. Et il en croit encore moins son cerveau qui, définitivement, doit mal interpréter les sons car en plus, elle demande à vraiment le rencontrer. Il sort du lit en catastrophe, va voir son agenda avec ses horaires et convient comme il peut d'un moment et d'un lieu où se rencontrer. Ça marche, oui, à bientôt et voilà. Il raccroche. Il regarde le combiné encore quelques secondes, se demandant s'il a bien tout comprit ou si c'est un rêve. Il note son rendez-vous sur un post-it et dans le doute, retourne se coucher. Quand il se réveillera, il verra bien si la note a disparue ou pas.

*

La note était toujours là à son réveil. Alors, il s'était préparé intégralement. Douche, rasage de prêt, catogan. Vêtement pour le mois de juin, tee-shirt blanc, veston noir et jean's classique un peu large.
Le jardin du Luxembourg avait été décidé un peu à la va vite, à vrai dire.  Et de manière totalement subjective : il aimait bien ce parc, il n'était pas loin de chez lui plus, il avait décidé d'y faire un tour, 3DS en mains, pour streetpasser quelques gus et continuer un peu une partie.
Quand l'heure du rendez-vous arrive, il est déjà là, en avance, sur un banc qu'il a maladroitement indiqué de signe distinctifs peut-être bancal, peut-être douteux. Il est aux aguets.

Les yeux cachés derrières des lunettes de soleils, tel le pervers de base, il observe, plisse les yeux et se concentre, zieute chaque fille qui marchent devant lui, dévisage chaque jupe noire qui lui passent le bonjour. Quelle idée de donner une jupe comme point distinctif ! Car maintenant, à part regarder des hanches -pour ne pas dire fesses- de filles, il fait comment, hein ? Non, ça ne lui fait pas spécialement plaisir. On pourrait même dire que ça l’embarrasse sérieusement. Il est rouge et le soleil n'y est pour rien.
Quelques minutes après l'heure du rendez-vous se sont écoulées et déjà, le stress le gagne. Il imagine le coup de fil canulars, les téléphones braqués sur lui qui le filment, pauvre couillon qui s'est fait avoir. Couillons qui regarde juste les filles et leurs cuisses. Il imagine la vidéo Youtube "pervers dans le parc du Luxembourg" les soucis en conséquence et... puis il repère. Fille rousse, jupe noir. Oh ? Le canulars n'en serait-il pas un ?

« Juliette ? » appelle-t-il timidement. Elle répond et il peut la voir entièrement, qui passe entre la foule.

Il aurait alors bien volontiers craché ce qu'il avait dans la bouche. Mais cette dernière étant vide, il se contenta de s'étouffer avec sa salive.

Punaise.

Ce canon ! Et quel paire de... !

Après avoir raccroché, la jeune femme s'était remise à travailler, même si elle commençait à douter du sérieux de la personne qui avait passé l'annonce, après tout, ce n'était pas du tout discret le fait qu'elle l'avait réveillé en l'appelant. Mais elle n'avait rien dit, elle attendrait de l'avoir vu en vrai pour savoir si son intuition était juste. Mais il ne faut pas juger un livre à sa couverture, elle était bien placée pour le savoir après tout.

Les heures passaient et l'heure du rendez-vous approchait de plus en plus. La rousse se prépara donc et quand il fut presque l'heure, elle sortit de chez elle. Elle se dirigea vers l'arrêt de bus le plus proche pour se rendre au jardin du Luxembourg. Quand elle regarda l'heure sur son portable, l'heure du rendez-vous était passée de quelques minutes, mais ce 'n'était pas très grave puisqu'elle venait d'arriver. Elle se mit à marcher parmi les familles avec jeune enfant et les personnes âgées qui venaient se promener ici. Elle cherchait du regard l'homme avec qui elle avait rendez-vous, mais elle ne le trouvait pas. Alors qu'elle cherchait, elle entendit quelqu'un l'appeler, elle se tourna donc et repéra celui qu'elle devait retrouver.

Un grand sourire apparut sur e visage de la jeune femme qui se dirigea vers lui, se frayant un chemin dans la foule. Elle lui vit un grand signe de la main et se mit devant lui. Elle le vit s'étouffer et ne se demanda même pas pourquoi. Par contre quand elle arriva devant lui, elle pencha la tête sur le côté avant de prendre la parole.

« Ça ne va pas ? »

Elle attendit qu'il lui réponde et lui offrît ensuite de nouveau un grand sourire. Elle s'approcha de lui pour lui faire la bise. Elle s'éloigna ensuite de lui et le regarda. Elle n'arrivait pas à dire s'il faisait son âge, sur l'annonce, il disait avoir 36 ans, mais il faisait à la fois jeune et vieux, au moins, comme ça, elle ne se rendrait pas compte qu'il avait quand même 14 ans de plus qu'elle, si elle emménageait en colocation avec lui.

« Je suis contente de vous rencontrer. Je ne vous ai pas dérangée ce matin ? »

Bien-sûr qu'elle savait qu'elle l'avait dérangé, elle l'avait bien entendu à sa voix au téléphone, mais bon, autant jouer le jeu jusqu'au bout. Quand il lui répondit, elle sourit un peu plus et prit son air candide habituel. Elle repéra alors la 3DS qu'il avait dans la main. Elle joignit les mains devant elle avec un grand sourire joyeux.

« Oh, tu as une 3DS, tu joues à quoi ? »

Oui, elle avait complètement abandonné le vouvoiement et son regard passait de la 3DS au visage du jeune homme, son grand sourire toujours présent sur ses lèvres. Il fallait qu'elle sache un petit peu ce qui intéressait le jeune homme pour pouvoir gagner des points auprès de lui et réussir à avoir la place de colocataire.

Spoiler:

Narines. Oreilles. Il énumère. Sourcils. Joues. Il énumère ce qui va par paire et qu'il est convenant de regarder. Yeux...

Oui, yeux, c'est bien, yeux !

Anicée accrocha son regard dessus, tel une bouée salvatrice qui le sauverait de la tempête. Certes, il ne pouvait pas vraiment cracher sur de belles formes, sur des courbes agréables à l’œil, se disant que quelque part, c'était humain. Cependant, il ne voulait pas croire que l'homme était destiné à n'être qu'un animal sans self-contrôle. Il pouvait regarder respectueusement quelqu'un, oui, même si elle était du sexe féminin et que sa poitrine semblait hurler « regardez moi » en lui sautant au visage. Puis, il ne voulait pas mettre Juliette mal à l'aise. Et il souhaitait faire oublier son attitude idiote du matin. Mais tout concentré qu'il était, il en oublia certaines phrases que prononçait la jeune femme, tout obnubilé à la regarder uniquement dans les yeux. Il en oubliait presque de respirer. Ah, si, ça lui revient : il prend une grande inspiration, fait passer son étranglement rapidement et prend une grande bouffée d'air après s'être raclé le fond de la gorge en toussotant.

Respire. Du calme. T'es pas un animal.

Il parvient à sourire, se recomposer ce visage avenant, doux et charmant qu'il arrive à faire à tous ses consommateurs et fait le détendu. À défaut de réellement l'être.

« Anicée Léonard, enchanté. »  Il lui tend la main pour la saluer. La bise, c'est encore vraiment trop tôt. « Et, bien... Je dormais, mais je présume que vous pouviez pas l'savoir. »

Enfin, si. Il avait marqué sur l'annonce, non ? Il lui semblait bien que si. Mais passons. Jeu. Elle lui a demandé son jeu.

« Luigi's mansion 2. Il est vraiment pas mal j'l'ai eut y'a pas longtemps, mais la durée de vie... » Bizarre, c'est pas ce qu'il aurait demandé en premier pour une historie de colocation. Comment tu vis ? Combien le loyer ? Est-ce que les voisins sont chiants ? Tes horaires, est-ce que je peux faire ci ou ça... ? Des trucs du genre, oui. Est-ce que par hasard elle se ficherait de lui ? Anicée commence à retomber dans sa croyance de canulars. Il se coupe lui-même la parole et reprend avec une franchise doucereuse : « Attends... si tu veux juste faire des rencontres sympas, y'a DS in Paris pour parler jeux DS. C'est plus simple et sûr que répondre à une annonce louche. »

Zut, il n'a pas le temps pour des réponses pas sérieuse. Les jours passaient et bientôt, l'idée d'un plus petit appartement viendrait l'étrangler pendant la nuit.

La jeune femme était arrivée un petit peu en retard au rendez-vous et après il avait fallu qu'elle trouve l'homme avec qui elle avait rendez-vous. Il finit par l'interpeller, en le voyant, elle eut un grand sourire et se fraya un chemin dans la foule pour aller le rejoindre. Quand elle arriva à son niveau, elle le vit s'étouffer et lui demanda donc si ça allait. Elle enchaina rapidement en lui demandant si elle ne l'avait pas dérangé le matin même quand elle l'avait appelé. Bien-sûr, elle savait qu'elle l'avait réveillé, ça c'était entendu, mais elle fit comme si de rien n'était. Il se présenta avant de lui répondre, lui disant qu'il dormait, mais qu'il supposait qu'elle n'était pas au courant. Si, elle le savait, mais bon.

Elle remarqua ensuite la 3DS qu'il tenait, elle lui demanda alors à quel jeu il jouait. Il ne tarda pas à lui répondre. Elle n'avait pas ce jeu et il ne la tentait pas, en fait, elle n'avait pas vraiment de jeu vidéo, mais il fallait qu'elle sache ce qu'il aimait pour pouvoir en tirer partit et essayer de gagner se place en tant que colocataire. Il marqua une pause avant de lui dire que si elle cherchait à faire des rencontres sympas, ce n'était pas en répondant à une annonce comme la sienne. Elle gonfla alors les joues comme une enfant capricieuse qu'on venait de disputer. Elle avait posé la question pour en apprendre un peu sur lui et pour détendre l'atmosphère, mais bon, apparemment, il n'avait pas apprécié, c'est en tout cas ce qu'elle en déduisit.

« Je demandais juste pour être gentille hein ! » Elle croisa les bras avant d'enchainer « L'appartement est où dans le cinquième ? »

Puisqu'il fallait qu'elle pose les questions sérieuses tout de suite, autant commencer par le plus important, l'emplacement de l'appartement où elle allait peut-être emménager. Il fallait qu'elle sache si il était plus proche de son école de commerce que là où vivaient ses parents et si ce n'était pas très loin de chez ses parents, pour qu'elle continue de voir régulièrement sa grande sœur chérie. Elle avait dégonflé ses joues avant de poser la question et le regardait maintenant en silence, gardant tout de même les bras croisés. Une question lui traversa l'esprit, mais elle ne la poserait sûrement pas, comment elle allait faire pour déménager. Elle n'aurait pas grand-chose, mais même si ce n'était que deux ou trois cartons, ce serait trop lourd, hors de question qu'elle porte quelque chose de trop lourd. Elle se débrouillerait pour avoir son frère et son père pour l'aider.

Elle gonfle les joues. Vraiment, gonfler les joues ? Comme un rondoudou courroucé ou un gosse qui se dit que retenir sa respiration à en étouffer est un bon moyen de pression ? Pendant un instant, l'idée d'appuyer avec le doigts dessus le traverse, mais même avec son manque de savoir vivre social, il sait qu'il ne doit pas faire un truc du genre. À la place, il arque un sourcils et se sent un peu désarmé face à ça. Il se dit qu'il a peut-être été un peu sec auparavant et s'en veut peut-être un peu. Deviendrait-il désagréable avec sa crainte des canulars ? Oui, il devient carrément antipathique.

Anicée se dit alors qu'il doit juste rester calme, correct et poli. Envers cette jeune femme qui défit par son existence les mensurations féminines normales, il doit rester impeccable. S'il est vraiment filmé pour être humilié par la suite, son comportement doit être le plus normal possible. Une vidéo chiante n’intéressera jamais personne, même avec un titre accrocheur. Il se détend.

« Pardon pour le ton sec. Depuis le début de cette histoire, je suis un peu... stressé à l'idée de devoir partir de chez moi et... et maintenant, je crains en plus les canulars et blagues à la cons. » Il secoue la tête. Pour plus de politesse, il faudrait qu'il baisse un peu le regard, signifiant qu'il est honteux. Mais baisser le regard, c'est croiser deux quelque chose qu'il aurait du mal à quitter ensuite. « Ça me rend un peu bête, désolé. Surtout que c'est moi qui invitait à faire plus amples connaissances à la base »

Il lève l'index vers la jeune femme, cherchant à capter son attention.

« Reprenons de Zéros, voulez-vous ? Je m'appelle Anicée Léonard, j'ai 36 ans, je suis barman, habituée aux horaires de nuits. J'aime jouer aux jeux vidéo quand je suis chez moi, j'ai quelques amis, mais ne les invites que rarement, passant assez de temps chez moi, ces derniers tentent plutôt de me faire sortir. Je suis plutôt tranquille, du moins je pense et... Un peu angoissé sur certain truc, ha ha. »

La bonne blague.

« Et l'appartement se situe dans le 5ème, rue Mouffetard. C'est une rue très sympa, commerçante et tout. Quartier latin. Je ferais bien un cours d’histoire, mais franchement, j'y connais rien ! » C'était le moment "je n'ai aucune culture et l'avoue avec enthousiasme !". Il réfléchit, lève les yeux au ciel, se grattant son mentons qui crisse un peu sous ses doigts, avec la barbe naissante. « Hum, l'appartement est grand, je suis en train d'enlever les trucs dans une des salles pour en faire une chambre. Les voisins sont tranquilles. Quelques chieurs, mais on s'y fait. Et d'autres très chouettes aussi, c'est un immeuble très contrasté. »

Il hausse les épaules.

« Je crois que c'est tout ce qu'il me vient. À vous. »

Il sourit, espérant que ses efforts ne laisseront pas la jeune femme insensible, qu'elle acceptera de passer outre son comportement idiot et d'aller de l'avant. Il espère, oui.

Quand il répond de manière plutôt froide et désagréable à la tentative de la jeune femme de s'intéresser à son jeu, elle se mit à gonfler les joues, comme une enfant vexée. Il finit par s'excuser et les joues de la jeune femme se dégonflairent d'elles-mêmes. Il lui avoue alors être stressé et avoir peur d'un canular. Un canular ? Pourquoi ça ? Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi il avait peur de ça, elle était vraiment intéressée par la colocation, ça ne se voyait donc pas ? Alors qu'elle allait lui dire que ce n'était pas un canular et qu'elle était vraiment intéressée par la colocation, il leva l'index vers elle et elle loucha dessus avant de le regarder de nouveau, se demandant ce qu'il avait.

Il lui dit alors qu'ils allaient reprendre à zéro, il se représenta, lui précisant son âge et son métier qu'elle connaissait déjà puisque c'était précisé sur l'annonce. Elle apprit cette fois qu'il aimait jouer aux jeux vidéo et qu'il n'invitait pas ses amis chez lui. Il lui annonça aussi qu'il pensait être tranquille et qu'il s'angoissait sur certaines choses. Non sans blague ? Elle ne s'en était pas rendu compte. Peut-être qu'il avait dit ça pour plaisanter, mais elle ne s'en était pas rendu compte, en même temps, Juliette et l'humour ça faisait trente-six mille. Elle ne réagit donc pas continuant de le regarder en souriant. Il enchaina ensuite sur l'appartement en lui-même lui donnant la rue exacte où il se trouvait. Il sembla ensuite réfléchir à ce qu'il pouvait dire de plus, c'est en tout cas ce qu'elle déduisit en le voyant lever les yeux au ciel et se gratter le menton. Il resta ainsi quelques instants avant de reprendre lui disant que l'appartement était grand et qu'il était en train de faire la seconde chambre en débarrassant une pièce. Il lui donna des indications sur les voisins. Il lui dit ensuite que selon lui 'était tout et laissa la parole.

« Moi c'est Juliette Couturier, j'ai 22 ans et je suis en école de commerce. Je gagne de l'argent en travaillant comme vendeuse de temps en temps. Je passe beaucoup de temps avec mes amies, mais je ne les ferais pas venir à l'appartement. Je vis pour le moment toujours chez mes parents, c'est pour ça que la colocation m'a intéressée. »

Elle marqua alors une pause cherchant ce qu'elle pouvait dire de plus. Elle posa son index sur son menton, levant les yeux au ciel. Elle ne pouvait pas lui dire que son travail de vendeuse n'avait rien d'officiel, mais elle préférait dire qu'elle travaillait, comme ça, elle avait plus de chance d'être prise puisqu'il savait qu'elle gagnait de l'argent. Quand elle trouva, son sourire revint et elle se remit à regarder le blond devant elle.

« Je pense être agréable à vivre et je pourrais même essayer de faire la cuisine, ça à l'air amusant. »

Elle lui offrit un grand sourire espérant marquer des points pour avoir la place. Après tout peut-être que d'autres personnes avaient répondu à l'annonce, ce qui ne la surprendrait pas. D'ailleurs, si elle voulait continuer de marquer des points, il fallait qu'elle pose des questions qui montraient qu'elle s'intéressait à l'appartement puisque le fait de s'intéresser à ce qu'il aimait ne marchait pas.

« Le loyer serait de combien ? »

Il a du mal à décrypter sa réaction. Elle reste d'un sérieux incroyable, ne vacille même pas à la petite pique qu'il s'est auto-lancé. Pas de sens de l'humour ou c'est le siens qui déraille ? Il ne sait pas et ne sait pas trop comment le prendre. Bien bien bien, on sait mettre de l'ambiance ou on ne sait pas.

Concentration. Intérieurement, Anicée note ce que débite la jeune femme, essayant alors de comprendre un peu mieux la personne qu'il a en face. Il se demande si le fossé de 22 ans ne va pas rendre la cohabitation impossible ou compliquée à gérer. Est-ce qu'il pourront se comprendre un peu ? Il y a bien des points où le blond se considère encore comme un adolescent attardé, mais il se demande. Elle se dit facile à vivre, il se dit aussi facile à vivre... gage de bonne cohabitation ?

Anicée est assit sur le banc du début, plus trop certain du moment où il s'est levé ou quand il s'est assit -ou peut-être est-ce la personne derrière le clavier qui ne sait plus très bien - quoi qu'il en soit, il finit par hausser les épaules et répondre à tout ce qui vient d'être dit, énumérant chaque point sur le bout des doigts.

« Alors, le premier point, c'est 600 euros le loyer et non, c'est carrément pas cher pour la surface à Paris dans le quartier Latin. J'ai eut cet appartement un peu par chance. Tu connais les collocations avec les personnes âgées ? Tu les aides, elles te louent une chambre ? J'ai eut ça. Sauf que ma vielle a finit par se barrer dans le sud, alors, parce que j'étais le gentils jeune-homme, la famille me laisse l'appart à prix d'or. Malheureusement, ils sont quand même conscient des prix, ils peuvent pas me le louer gratuitement.

Bref, tout ça pour dire que l'idée de la coloc', ils sont d'accord, c'est bien cool, mais un « je travaille de temps en temps », je suis pas sûr que ça passe pour eux. Un CDD, pour les appartements, ça emmène jamais bien loin, tu auras besoin de d'avantage solide. Faudra sans doute que tu demandes à tes parents d'assurer tes arrières... même si c'est toi qui paye au final. »

Anicée reprend une inspiration, après la longue tirade qu'il vient de lancer, et sort la cigarette électronique qu'il garde en poche. Il en fume une bouffée, son visage se détend :

« Comme j'ai dis, je ne suis pas là la plupart des soirées, alors, tu peux bien inviter tes amies, ça devrait le faire. On va juste mettre cette règle là dès le départ : je rentrerai jamais dans ta chambre, j'en attends de même de ta part. Après, tu vis ta vie, tu fais cramer la cuisine, inonde la salle de bain, bouche les toilettes... Ce que tu veux ! »

Il sourit, espérant que ce nouveau trait d'humour détendra un peu l'atmosphère. Vivre avec une psychorigide, c'est pas tentant ? Enfin, au cas où elle ne comprenne pas cette nouvelle pique, il ajoute :

"Oh, et qui fait des dommages nettoies, j'en ferais de même. Mais après, ça peut être souple, je pourrais t'aider également si besoin."

Le jeune homme, décida après quelques instants, qu'ils reprennent tout à zéro. Il se représenta donc lui expliquant un peu mieux ce qu'il fallait qu'elle sache sur l'appartement où il vivait. Quand il eut terminé de tout lui dire, il lui dit que c'était à son tour. Elle se présenta donc elle aussi, mais elle n'avait même pas fait attention au fait que le blond avait fait de l'humour. En même temps, elle n'était pas très bon public, elle ne riait jamais quand on faisait de l'humour, pas qu'elle n'avait pas le sens de l'humour, quoi que, mais simplement parce qu'elle ne savait jamais qu'il s'agissait de blague, aussi drôle pouvait-elle être.

Enfin, donc elle se présenta à son tour, essayant de donner des informations qui pouvaient intéresser l'homme face à elle. Elle aborda aussi le fait qu'elle gagnait de l'argent, car même si son travail n'était pas officiel, il existait quand même. Quand elle eut terminé, elle lui demanda de combien serait le loyer, tentant de montrer que ça l'intéressait puisque quand elle avait voulu s'intéresser à ce que pouvait aimer l'homme, il avait cru qu'elle n'était pas sérieuse. Il se mit donc à lui répondre, commençant par le loyer. Elle avait bien que ce n'était pas cher, mais quand il lui dit, elle se contenta d'hocher la tête en prenant l'expression que pourrait avoir un enfant qui était concentré sur ce qu'on lui disait et qui tentait de tout mémoriser.

Il lui expliqua également pourquoi le loyer était aussi peu cher avant d'enchainer en lui disant que le fait qu'elle n'est pas de contrat réel et de réel métier ça n'allait pas forcément passer avec les propriétaires, qu'elle aurait sûrement besoin que ses parents se portent garant. Pour ça, elle savait qu'il n'y aurait pas de problème, elle hocha donc la tête une nouvelle fois. Il s'arrêta ensuite et sortit une cigarette électronique. La jeune femme le regarda faire et en profita pour prendre la parole.

« Je demanderais à mes parents alors »

Elle sourit et il reprit la parole, lui expliquant qu'avec son travail, il ne serait pas là le soir et que donc elle pouvait inviter des amis. La première chose qui lui vint à l'esprit, ce fut d'inviter sa sœur à venir dormir à l'appartement si elle allait y habiter. Il lui dit également qu'il y aurait une règle, ils ne rentreraient pas dans la chambre de l'autre, elle comprit que c'était question d'intimité et elle était tout à fait d'accord pour cette règle, c'était la moindre des choses de toute façon quand on vivait avec des étrangers, ça lui paraissait tout à fait normal. Il tenta ensuite à mettre de l'humour encore une fois. Et pour la seconde fois, la jeune femme ne comprit pas l'humour caché dans sa phrase. Il enchaina d'ailleurs rapidement en disant que celui qui endommagerait, nettoierait. Encore une fois, cela semblait normal à la rousse.

« Je n'ai jamais cramé de cuisine »

Elle le dit en arborant toujours son grand sourire et avec une certaine fierté. Elle avait compris tout ce qu'il y avait à comprendre concernant ce qu'il venait d'expliquer et elle était toujours partante pour vivre en colocation avec lui. Même si elle n'avait pas compris son humour, elle le trouvait plutôt gentil et si il n'était pas là la nuit, il dormirait sûrement dans la journée, quand elle serait en cours, donc ils ne devraient pas vraiment se croiser et donc il y avait peu de chance pour que des conflits puissent naitre entre eux. Elle décida donc, avec un grand sourire de lui annoncer qu'elle était toujours prête à emménager avec lui si les propriétaires voulaient bien d'elle.

« Si la vieille dame et sa famille sont d'accord, moi, je veux bien venir vivre avec toi. »

Elle le regarda en continuant de sourire, elle était sincère, elle était vraiment prête à le faire, puis, si il lui avait donné tant d'information, c'était que lui aussi était pour qu'elle tente sa chance auprès des propriétaires avec son dossier. Ou peut-être que ce serait lui qui parlerait d'elle aux propriétaires... C'était vrai ça d'ailleurs, comment ça allait se passer ?

« Il faut que je te donne un dossier ? »

Deuxième trait d'humour, tu es en train de te faire souffler par le vent, après t'être écrasé contre le mur du premier degré. Le choc fut violent, assez pour faire avoir les yeux ronds à Anicée et il se dit, sourire aux lèvres, la tête penchée, qu'Ok, ça ne servira à rien d'essayer d'être drôle.
Au moins, alors, elle ne se vexe pas alors qu'il vient plus ou moins de sous-entendre qu'elle était une catastrophe ambulante.
Ou alors, têtu, peut-être qu'il continuera à faire des traits d'humour. Il lèvera juste une pancarte avec écrit dessus « humour » ou « rire enregistré » et peut-être, dans un élan d'espoir, il se dit qu'à la fin du séjour, elle pourra rire à deux trois blagues.

Anicée, vil coquin et grand optimiste, tes espoirs te tueront.

Il secoue la tête, essaye de rattraper les paroles de la jeune fille et hoche la tête. Si les parents veulent bien, alors, il n'y aura pas de soucis. Il note le tutoiement, sourit et taquine gentiment :

« On passe au tutoiement, maintenant ? Bien ! »

Enfin, c'est surtout lui qui a commencé à tutoyer, mais ne brusquons pas son cerveau.

« J'vais plutôt te donner leurs coordonnées, ça sera plus simple. La paperasserie, c'est vraiment pas mon truc. Ils te diront directement ce dont t'as besoin. »

Anicée range la cigarette, sort son téléphone et en quelques manipulations, il envoie par message adresse et numéros de téléphone à Juliette, qu'elle puisse contacter les propriétaires sans lui. Lui, son rôle, depuis le début de cette histoire, c'est trouver quelqu'un avec qui ça pourrait marcher. Et il se dit que peut-être que ça pourrait marcher avec elle. Elle est mignonne, a l'air gentille -malgré son handicape humouristique flagrant- et vu ses horaires, les risques de se croiser seront plutôt réduit. En somme, ça fera une salle en moins et une hygiène à avoir en plus ? Anicée se dit que ça peut le faire.

« Tu pourras me recontacter quand t'auras eut leurs réponses, mais il ne devrait pas y avoir de soucis. Et si t'as besoin d'aide pour emménager, dis le moi. Oh, avant, je te ferais peut-être visiter la chambre quand même. »

Quand elle sera rangée lui affiche en gros caractères son cerveaux devant la rétine. C'est bien gentil, mais il va pas lui montrer l'antre d'ours dans lequel il habite actuellement, n'est-ce pas ?

« Dans la semaine. Ce soir, ça va pas être possible, je...Je.  je. Bosse. »

Oui, voilà. Enfin, il avait quelque heures devant lui de libre, mais il ne pouvait, lui dictait les quelques brides d'honneurs qui l'habitaient encore, inviter une jeune femme chez lui à l'heure actuelle.

« Oh, et tant que j'y pense ! » Tilt, avait fait la petite ampoule dans son cerveau qui cherche à vite changer de conversation, « Je mets des veilleuses sur les murs. Tu n'auras pas à en avoir dans ta chambre, vu que je n'aurais pas à y rentrer, mais dans les salles communes, ce serait gentil de les laisser. » Il sourit d'un sourire idiot et continue « Parce que j'ai peur du noir. » Ha ha, humour ! Oui, second degré qu'elle ne comprend pas la miss Juliette, ça lui revient ? Et vu le ton sérieux qu'il a emprunté, nul doute que la rouquine risque juste de le croire sur parole. « Heu, c'est une blague. » Sauf que s'en est pas vraiment une. « Enfin, un peu une blague. Enfin... J'ai peur que les murs me tombent dessus ! »

Dommage, Anicée, ton comportement charmant était devenu presque parfait. Nan, mais c'est bien d'être naturel. Il ne faudrait pas que la demoiselle se trompe sur le peu d'aisance sociale qui se logent sous ta chevelure blonde. Pire ! Qu'elle t'imagine normal et qu'elle ait une bonne image de toi.[/color]

Encore une fois, la jeune femme n'avait pas compris l'humour dont avait fait preuve l'homme blond face à elle, il était tenace, c'était déjà un bon point pour lui. Puis au moins comme ça, il savait qu'elle n'avait jamais mis le feu à une cuisine, ça pouvait le rassurer sur ses talents de cuisinière ou pas. Elle lui dit ensuite que si la propriétaire et sa famille étaient d'accord, elle était toujours pour le fait d'aller vivre avec lui. Il sembla surpris par le fait qu'elle le tutoie, mais sembla l'accepter. Elle enchaina ensuite en lui demandant si elle devait lui donner un dossier, il lui dit alors qu'il allait lui donner leur coordonné afin que ce soit plus simple pour elle et pour lui.

Il rangea alors sa cigarette et envoya à l'aide d'un sms, l'adresse et le numéro de téléphone de ces personnes à la jeune rousse. Si il lui donnait c'était qu'il pensait qu'elle pouvait faire l'affaire pour la place. En même temps vu son travail, ils ne se croiseraient pas beaucoup donc les risques de disputes étaient minimes, ce qui était plutôt une bonne chose. Il reprit la parole pour lui annoncer qu'elle pourrait le recontacter lorsqu'elle aurait eu la réponse des propriétaires, il lui proposa même de la faire visiter la chambre. Il marqua une pause avant d'ajouter que ce serait uniquement dans la semaine parce qu'il travaillait le soir-même. La jeune femme hocha alors la tête sans perdre son sourire.

« D'accord, tu pourras me contacter pour me dire quand. »

Après tous, ils avaient tous deux le numéro de l'autre alors il n'aurait aucun mal à la joindre pour lui donner une date pour visiter. Il enchaina ensuite en lui disant qu'il avait mis des veilleuses sur les murs et il lui demanda de les laisser dans les parties communes, lui précisant ensuite qu'il avait peur du noir. Elle crut qu'il était sérieux, comme à chaque fois et le regarda alors de manière étonnée. Elle n'avait jamais rencontré une personne plus âgée qu'elle qui avait peur du noir, ça la surprenait vraiment. Il lui dit alors que c'était une blague, il fallut quelques instants pour que ça monte au cerveau de la rousse et elle se mit alors à rire légèrement, si c'était une blague, elle devait rire, non ? Alors qu'elle était en train de rire, il lui dit que ce n'était qu'un peu, une blague et enchaina en disant qu'il avait peur que les murs lui tombent dessus.

Est-ce qu'il blaguait ou est-ce qu'il était sérieux ? C'était la question que se posait la rousse en sachant qu'il venait de faire une blague peut-être qu'il continuait de plaisanter et comme elle ne savait pas du tout reconnaitre l'humour et le second degrés, elle hésitait, se demandant si elle devait rie ou non. Dans le doute, elle décida de ne pas rire. Il croyait que les murs pouvaient lui tomber dessus ? Mais comment c'était possible ? Il s'agissait de la nouvelle question qui trottait dans la tête de la jolie rousse.

« Mais les murs ne peuvent pas tomber sans raisons. Non ? »

Intérieurement, elle le trouvait vraiment bizarre de pouvoir penser à quelque chose comme ça, un mur ne tombe pas sans raison, à moins que son appartement soit vraiment en piteux états. Si c'était le cas, il valait mieux qu'elle le visite le plus vite possible afin de s'assurer qu'elle pouvait y emménager. Mais elle ne laissait pas transparaitre le fait qu'elle commençait à douter de l'état dans lequel pouvait se trouver la structure de l'appartement.

« En tout cas, je n'y toucherais pas, promis »

Elle avait dit ceci avec son grand sourire, celui qu'elle arborait depuis qu'elle avait rencontré l'homme quelques dizaine de minutes plus tôt.

Drague là. Pas ma future colocataire, non.
Fait un trait d'humour. Elle n'en rira pas.
Bon, sauve toi. Super fuite, elle a mon numéro et bientôt l'adresse.

Le cerveau d'Anicée sèche. S'il en avait, il croiserait les bras en bougonnant, grommellerait et se pincerait le nez entre les deux yeux. Le blond vient de se mettre une tartine de honte dans la bouche, c'est très amer et il aimerait vraiment se débarrasser du goût en trouvant L'Idée du siècle, celle qui mériterait une majuscule, celle qui lui permettrait d'effacer la conversation précédente de la mémoire de la Jolie Juliette.

Fait la disparaître alors.
Anicée s'insurge. « Mais ça vaaa... » commence-t-il avant de se souvenir qu'il n'est pas tout seul « ...aaa être possible cette semaine je pense ! » joli rattrapage se félicite le cerveau. C'est limite si des petites oiseaux chantent dans sa bouche quand il parle. « Oui, je trouve mon agenda et je t'envoie les possibilités dès que possible ! » Clin d'oeil beaux-gosse, limite ringard, Anicée n'a rien de mieux pour le moment à offrir. À part une explication. La jeune femme se demande et le blond commence à comprendre que ce n'est pas du foutage du gueule. Elle est peut-être juste un peu... trop rationnelle, se dit-il. C'est ça : rationnelle.

« Sauf quand c'est une phobie. » Il mâchonne ses mots pour trouver une explication la plus logique à ça. Oh, elle finira par savoir un jour alors, autant se jeter à l'eau, pas vrai ? « C'est juste, avec un peu de raison, on se dit que les murs, ça ne tombe pas. Le soucis, c'est que la phobie, elle retire cette raison. » Jeter à l'eau, on a dit. Anicée, tu tournes autour du pot, s'en est presque pitoyable. La vraie raison n'est pas si honteuse, pourtant. « J'suis claustrophobe à mes heures perdues... et mes heures retrouvées aussi. Tu enlèves les loupiotes, je panique comme un dingue que les murs vont me tomber dessus. »

Voilà, c'était pas si compliqué. Il regarde la rouquine, haussant les épaules avec un dédain feint et trouve un intérêt palpitant à cette petite feuille verte qui est d'un vert si différent des autres milliers de petites feuilles vertes de la même teinte. Son esprit se balade, bien peu enclin à regarder exactement à quel sauce Juliette va se moquer. Se moquer ? Il se dit, un froncement de sourcils en prime, qu'au fond, ça n'a pas l'air d'être le genre de la jeune femme. Son regard bleu finit par couler sur elle, dans l'attente.

« À part ça, je vais très bien. » ajoute-t-il. ''Je me balade en slip chez moi car j'ai l'impression d’étouffer'' pourrait-il bien conclure mais plutôt, il changera ses habitudes. Ça sera mieux, oui.

Alors qu'un léger blanc s'est installé après que la jeune femme lui ai dit qu'il pouvait la recontacter quand il pourrait lui faire visiter. Elle pensait qu'il était en train de réfléchir à une date où il serait libre, mais vu le ton qu'il avait quand il commença sa phrase, elle douta de ça. Pourtant, il reprit un ton plutôt normal en lui disant que ce serait sûrement possible cette semaine. La jeune femme eut alors un grand sourire avant d'hocher la tête, cette semaine ça lui allait, normalement elle n'aurait pas trop de travail avec ses cours. Il lui dit ensuite qu'il regarderait son agenda et lui enverrait ses disponibilités le plus rapidement possible. Nouveau hochement de tête de la part de la jeune femme qui n'avait même pas remarqué le petit clin d'œil du blond.

Le sujet de discussion dévia ensuite légèrement, le jeune homme l'informant qu'il y avait des veilleuses sur les murs des pièces communes et lui demanda de ne pas les retirer. Elle ne comprit pas vraiment pourquoi et come il venait juste de faire de l'humour, à ce qu'il lui avait dit, elle se demanda si il plaisantait et si elle devait rire de ça. Dans le doute, elle décida de ne pas le faire. Elle fit alors la réflexion que les murs ne tombaient pas tout seuls et sans raison. Il lui fit alors remarquer que si, si il s'agissait d'une phobie. Une phobie ? Ah, alors là oui ça s'expliquait, il reprit alors la parole pour lui expliquer puisqu'elle avait gardé l'air de quelqu'un qui ne comprend pas. Il lui parla de la raison et de ce que la phobie enlevait de raison avant de finalement lui dire qu'il était claustrophobe.

« Ça ne doit pas être facile à Paris »

Paris, ou la ville où l'on est le plus serré et le plus souvent dans des espaces clos, entre les bus, le métro, le tram, il n'avait pas de chance, il serait plus à l'aise en province. Il reprit ensuite la parole pour lui dire qu'à part ça, il allait très bien. Elle lui sourit donc, elle en doutait, mais ça, elle ne le dirait pas, comme beaucoup de choses, ça resterait dans ses pensées, sans que personne ne sache qu'elle le pensait. Elle lui fit donc un sourire innocent avant de répondre.

« Je n'en doute pas »

Elle lui sourit de nouveau au jeune homme. Elle n'avait pas d'autres questions à lui poser et ne savait pas quoi dire de plus, elle n'avait pas de phobie particulière dont elle pouvait le mettre au courant. Si il n'avait plus rien à lui dire, elle allait peut-être rentrer chez elle pour commencer à préparer son dossier.

« Il y a d'autres choses que je dois savoir ? Sinon je vais aller préparer mon dossier »

Elle attendit patiemment qu'il lui dise si il y avait d'autres choses dont elle devait être mise au courant.

Il le pense. Quand il dit qu'il va bien, à part ça, Anicée le pense totalement. Il ne se sent pas à plaindre spécialement, pas plus qu'il n'imagine sa vie compliqué. Il imagine plutôt que chacun a ses soucis, ses facilités. Des difficultés qui sont propres à Chacun. Lui, il a ses démons, il a ses aisances, alors, il ne se considère pas comme à plaindre. Pas plus qu'il n'aime qu'on le plaigne, un trop plein d'attention qu'il ne veut plus endurer. Paris et son doux anonymat, la ville qui se réveille sans lui demander « tu as fait des cauchemars ? », qui s'endort sans lui murmurer « tout va bien ».
Il est grand, il s'en sort seul maintenant. Quoi d'autre ?
A regarder Juliette, il se demande qu'elle genre de vie elle a eut. Cuillère en argent dans la bouche ? Il se dit qu'il apprendra bien ça au fur et à mesure. Alors, il lâche un « Ouais » évasif aux remarques de la rousse, se questionnant sur ce qu'elle pense réellement. Il ne sait pas sur quel pied danser. Dit-elle ce qu'elle pense réellement ? Ou se tait-elle ? Est-elle vraie ou une simple fantaisie ?
Est-ce que la Juliette en face porte un masque ?
Ça aussi, il se demande s'il le verra plus tard ou pas, s'il aura l'occasion de la connaitre mieux. Mais après tout, les chances qu'ils se croisent réellement sont, au fond...

Anicée hausse les épaules et sourit, se disant que l'important c'est que les choses aient été dites, comme un possible problème qu'il espère désamorcé avant le moindre soucis. La conversation est close, semble-t-il, puisque la rousse n'ajoute rien.

Si, des questions. Le blond hausse les épaules, cherchant.

« Non, je ne crois pas avoir autre chose à ajouter. J'imagine que toi non plus, vu que tu sembles pressée de faire ton dossier, alors, ma foi... il ne me reste qu'à te souhaiter bonne chance ? »

Si elle en a besoin. Anicée se demande si elle aura réellement besoin, elle semble avoir confiance en elle et il se dit que ce ne doit pas être sans raison.

« Et si besoin, n'hésite pas à me contacter par téléphone, SMS ou n'importe si tu as une remarque ou s'il te vient quelque chose en tête. J'en ferais de même. »

Anicée sourit, encourageant. Là. Qu'y a-t-il à ajouter de plus ?

« Et c'est ainsi que prend fin notre entrevue ? »

Ou quelque chose comme ça. Les silences longs et gênants, non merci. Il se dit tout de même qu'elle est bien étrange, la rouquine. Qui ferait tant d'effort, qui se presserait tant pour un appartement même pas visité ?
Et vu l'énergie non dépensée à simplement faire la conversation, Juliette répondant simplement à ses questions de manière froide et méthodique, il imagine bien que ce n'est pas pour ses beaux yeux qu'elle s'agite autant...
Il se demande s'il pourront s'apprécier. Ne serait-ce qu'un petit peu.

Cette colocation l'angoisse. Mais il est grand, il ne va certainement pas l'avouer.

Spoiler:

HRP:

La jeune femme eut le droit à plusieurs explications et requête de la part du blond si jamais il venait à vivre ensemble et celle qui la surprit le plus ce fut le fait qu'elle ne devait pas enlever les veilleuses au mur, ce n'était pas ça en lui-même qui la surpris, ce fut plutôt l'explication qu'il lui donna. Enfin la première explication puisque quand il lui dit que c'était de la claustrophobie, ça semblait logique. Elle se disait tout de même qu'il était bizarre, mais bien-sûr, elle ne le montrait pas comme 99% de ce qu'elle pouvait penser, ça restait dans sa tête.

L'entretien arrivait à son terme, c'était tout du moins ce qu'elle pensait, ils avaient abordé tout ce qui, pour elle, devait être abordé. Elle lui demanda tout de même si il avait autre chose à ajouter. Elle avait envie d'aller faire son dossier afin d'avoir la réponse le plus vite possible et peut-être emménager en colocation avec le blond avant la rentrée scolaire. Elle se voyait mal déménager un week end avec ce qu'elle avait à faire et même pour lui, ce serait sûrement mieux qu'elle arrive avant la reprise des cours, même si il n'était plus concerné par ceci. Il lui répondit donc qu'il n'avait rien à ajouter et aborda le fait qu'elle semblait pressée de faire son dossier. Elle ne put que sourire un peu plus à sa remarque et elle hocha la tête. Il enchaina en lui disant qu'elle pouvait le contacter si elle avait besoin et qu'il ferait de même.

« C'est d'accord »

Répondit-elle le plus simplement, en souriant. Il lui demanda ensuite si c'était la fin de cette entrevue. Étant donné qu'elle n'avait rien à ajouter et lui non plus apparemment, oui, ce devait être la fin, ils n'allaient pas rester là à se regarder dans le blanc des yeux sans rien dire juste pour prolonger la rencontre.

« Oui, je pense. Merci pour les informations, je vais remplir le dossier au plus vite »

Elle le salua une dernière fois et tourna les talons pour rentrer chez ses parents afin de préparer son dossier. Elle fit le même chemin que celui qu'elle avait effectué quelques dizaines de minutes auparavant lorsqu'elle était venue ici pour l'entrevue avec Anicée. Il semblait gentil, peut-être qu'elle pourrait s'entendre avec lui, du moins en apparence, sinon intérieurement, elle le trouvait un petit peu bizarre. Mais peut-être que ce n'était qu'une apparence qu'il se donnait, comme elle se donnait cette apparence de fille naïve. Elle verrait lorsqu'elle vivrait avec lui.

En arrivant chez elle, elle alla tout de suite voir sa chère grande sœur avec qui elle resta un long moment avant de s'occuper de son dossier et de contacter la propriétaire. Elle voulait que tout soit fait le plus vite possible, même si elle savait que ce ne serait pas dans la journée que se serait fait.