Je m'étire dans mon lit. Plusieurs membres dépassent. Dans un effort, qui me semble surhumain, je range mes petits pieds sous ma couette toute duveteuse et chaude. Cette douceur accueille sans refus mon corps et ma peau, douce comme de la soie.
Un rayon de lumière croise mon regard…Un nouvel effort, cette fois-ci, pour me retourner de l’autre côté de mon lit et quitter ma position initiale afin de retrouver le repos. Je ne suis pas pressée après tout ? Oui, je n'ai rien à faire… D'ailleurs ce n'est même pas comme si j'en étais persuadée. Je réfléchis quelques secondes, à moitié endormie…
Rien à faire ?... C'est bizarre.
Quelques minutes après mettre de nouveau roulée en boule, sans réussir à me rendormir, j'attrape machinalement ma robe de chambre posée à côté de mon lit. Comme cela parait loin. Dormir au milieu du lit m'oblige à me déplacer d'un bon mètre pour en sortir.
Mes chaussons froids accueillent mes pieds tels des petits nuages. Je me lève vers la fenêtre d'où passe un rayon de lumière, se faufilant entre mes deux rideaux tirés. D'un mouvement sec et feignant, j'ouvre, du plus grand que je peux, les deux pans de tissus lourds et rose. La lumière m'aveugle et m'oblige à fermer les yeux plusieurs fois. Cette sensation semble pourtant me faire un bien fou mais… quelque chose semble différent.
Lorsque mes yeux s'habituent à la lueur vivace du lever du soleil, je me penche pour regarder la rue s'étirant sous ma fenêtre. Des gens s'amassent en bas, en petits groupes divers. J'ai du mal à les reconnaitre mais, il semble qu'ils n'aient rien à faire ici. Oui, vue d'ici il ne semble pas porter de vêtements… Passables ?
Un bâillement me saisit, suivi d'un frisson le long de mon dos. Une hésitation, puis un sourire s'étend sur mes joues. J'élance avec dynamisme mes bras vers le plafond de ma chambre et sautille pour m'étirer et m'écris :
« Le ciel est bleu ! Ça va encore être une magnifique journée ! Petit déj’ ! »
Oui, je savais que toutes mes journées, que dis-je, ma vie était parfaite ! Je lance au sol ma robe de chambre, qui de toute façon, sera rangée quand je reviendrais ce soir. Ma peau a nue, je choisis avec précautions mes vêtements. Combien de temps me faut-il ? Plusieurs dizaines de minutes pour me préparer. C’est étrange mais aujourd’hui, j’ai l’impression de redécouvrir ma garde-robe. Une armoire géante avec plusieurs rayons de vêtements. Un miroir géant se situe derrière un paravent très joliment décoré de branches de cerisier... En fait, après quelques secondes à regarder à droite et à gauche, il a plusieurs miroirs. Une adorable coiffeuse se trouve à côté, je m’assoie devant et admire mon reflet avec plus d'attentions.
« Alors, je ressemble à ça ? »
Quoi ? Mais c'est absurde de se dire ça… Bien sûr que je sais à quoi je ressemble. Mais… Ce reflet à pourtant quelque chose d'étranger. De nouveau, je balais cette pensée de mon esprit. Je ne dois vraiment pas être bien réveillée ! Je prends quand même quelques minutes pour admirer ce que je vois. Quelle beauté et magnificence. Ma mise en beauté devait justement me mettre encore plus en valeur ! Mes gestes sont mécaniques et précis. Je m'étonne même de savoir si bien faire. De simples couettes modestes mais bien faites, un maquillage léger juste là pour surligner ma beauté et une tenue simple mais taillée pour moi… de toute évidence. Ça tombe bien, je ne me voyais pas porter autre chose.
Je sors de ma chambre regarde autour de moi, quelle grande maison… ma maison ? Oui, bien sûr, qui d'autre. Je souris, amusée, quelle drôle de journée. Je me déplace vers la cuisine, qu'étrangement, ne trouve pas du premier coup. Ba, la maison est surement trop grande, n'est-ce pas ?
Sur la table de cette pièce démesurée, un liquide brun et chaud attend avec un panier de viennoiseries délicieuses. Je m’assois et commence à déguster la collation. Un mot en papier est posé devant moi…
Bonjour Chance, Papa et Maman sont déjà partis ! N’oublie pas de fermer la porte cette fois si tu sors ! Nous t’aimons fort !
Ha ! Bien… Cela me parait évident maintenant que je l’ai lu. Je me lève et après un brossage de dent minutieux, dans la salle de bain trouvée avant, au hasard d’un couloir, l’envie de sortir me saisit. Je n’aime pas être seule. Et une j’aime faire profiter les gens, de ce beau quartier, de ma beauté. Je suis généreuse après tout … Je prends un sac, très jolie, posé dans un coin de ma chambre. Dedans, il y a tout ce qu’une femme peut avoir besoin, dont une belle quantité d’argent. Je mets une petite veste et pose la main sur la porte.
« Sortir me fera du bien, je sens mon esprit quelque peu engourdi ce matin. Peut-être cela me rappellera ce que je dois faire aujourd’hui… probablement rien. »
Je sors et ferme la porte attentivement à clef. Je traverse le jardin calmement et me cale sur une démarche séduisante, prête à la garder dehors à la vue de tout le monde :
« Un pas devant l’autre et la tête haute, tu es belle, tu vas tous les mettre à t’es pieds. »
Quelques bruits de foule montent, derrière le mur important protégeant le jardin du monde extérieur. Une foire ? Ho ! Quelle chance ! J’ouvre le portail géant se dressant devant moi et le referme sans prendre la peine de regarder devant moi, avoir une allure assurée est ma priorité ! Je ferme les yeux, redresse mon visage et marche sur le trottoir, descendant la rue vers la place marchande. Quelques secondes de marche plus loin, j’ouvre les yeux et découvre un spectacle stupéfiant.
Des pauvres ! Des sous classes ! Des misérables ! Mais pas un ou deux venus demander de l’attention, mais des centaines ! Une vague s’avançant sur moi ! Je recule et sotte, je me coince contre un mur. Que me veulent-ils ?!
« Comment osez-vous m’approcher ?! Vous ne savez donc pas qui je suis ?! Ha pardon… Votre genre ne lit pas la presse et n’a pas d’autres centres d’intérêts que votre petite personne ! Jamais vous ne regardez au-dessus de vous ! »
Je sens comme un soulèvement commun dans la foule, pourquoi s’avancent-ils alors vers moi avec un regard nouveau ? Pourquoi moi ?
Soudain, une ombre noire s’élance devant moi, un homme s’interpose et étrangement, presque aussi vite, la foule menaçante s’éloigne et change de direction. Il détonne dans cet ensemble bleu mais quelle chance, je suis sauve ! Il ne pouvait être autrement après tout…
Mais, un ensemble bleu ? Je n’ai pas fait attention avant, mais ils présentent tous la même couleur… Mais, j’ai d’autres choses à penser. L’homme se retourne vers moi, je constate qu’il n’ait pas comme les autres bien qu’il ne paraisse pas vraiment du quartier.
« Vous allez bien ? »
Je l’admire quelques secondes joignant mes mains et souriant et… Perd vite ce sourire. Je reconnais rapidement cette chevelure et… J’ai déjà entendu parler de cet homme.
Malchance.
Certain raconte qu’il porte bien son nom. Je re-souris amusée par la situation. Bien qu’il ne soit pas de mon monde, son nom est l’opposé du mien.
« Oui, Merci beaucoup… Vous êtes arrivé à temps. Comment… »
Je ne sais pas si je fais bien de dire ça mais bon… Je le dois bien…
« Comment puis-je vous remercier d’avoir… effrayé ? … Hum, d’avoir effrayé toute une foule juste pour moi ? Ho… Vous devez surement être un fan, non ? »
Et, peut-être qu’après tout, lui montre un potentiel de progression sociale ?